Francis Poézévara

Conseiller municipal à Puteaux

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Second tour : le rassemblement plus que jamais nécessaire

Le premier tour de l’élection présidentielle a donc vu se qualifier Emmanuel Macron et Marine Le Pen. Je regrette évidemment le score de Benoît Hamon, qui était le seul candidat à proposer une vision pour l’avenir, une transformation profonde de la société pour plus de justice sociale et d’écologie. Pour le second tour, je voterai sans hésitation Emmanuel Macron.

Pour la deuxième fois en quinze ans, la gauche se retrouve donc éliminée au premier tour de l’élection majeure. Alors qu’en 2002, le front républicain était né dès le lendemain, cette année certains s’interrogent. Et pourtant, le rassemblement de tous les républicains est plus que jamais nécessaire.

Les fractures dans notre société sont multiples et profondes. Fracture entre les partisans d’une extrême droite “normalisée”, mais dont les fondations racistes et xénophobes réapparaissent régulièrement, et les partisans d’une France apaisée, respectueuse de ses citoyens et tournée vers les autres. Fracture entre les partisans d’une Europe de paix et ceux d’un retour au nationalisme. Fracture, même, à gauche, entre les partisans d’un vote par défaut pour faire battre le Front National et ceux qui souhaitent ne pas légitimer la victoire d’un candidat libéral.

Je fais clairement parti des premiers : je voterai toujours pour celle ou celui qui fera battre les idées nauséabondes de l’extrême droite. J’avais d’ailleurs déjà fait un appel en ce sens en décembre 2015, lors des élections régionales. Mais j’entends ceux qui ne sont pas du même avis. J’essaierai activement, avant le 7 mai, de les convaincre.

Je regrette la cristallisation des crispations entre partisans d’un vote Macron et d’un vote blanc. Je regrette ces réactions irrationnelles, qui amènent à comparer les futurs abstentionnistes à des fascistes. Ce n’est pas en fracturant davantage que nous arriverons à combattre la gangrène FN.

Rassemblons-nous, d’abord le 1er mai place de la République à Paris, contre le Front National. Rassemblons-nous ensuite le 7 mai, pour consolider ce plafond de verre qui nous sépare du désastre. Rassemblons-nous, enfin, au lendemain du second tour, pour lutter en profondeur contre les causes de cet enracinement du FN.

Mais ne nous divisons plus. Ne nous fracturons plus. Ras-sem-ble-ment !

21 avril : Souvenirs

21 avril 2002

Les résultats du 21 avril 2002

Impossible de ne pas évoquer cela aujourd’hui : il y a 7 ans, un véritable séisme avait lieu sur la scène politique française. Pour la première fois de l’Histoire (et l’unique, espérons !), le candidat d’extrême droite accédait au second tour des élections présidentielles.

Cela se passe le 21 avril 2002. La Gauche est au pouvoir depuis 5 ans. Son bilan est bon, comme le reconnaissent de nombreux observateurs. Lionel Jospin est donné gagnant dans de nombreux sondages, face à un Jacques Chirac soupçonné dans de nombreuses “affaires” douteuses. Tous les français en sont persuadés : le second tour sera un face à face entre le président sortant et son premier ministre. Mais plusieurs phénomènes viennent se greffer à cela.

Tout d’abord, les différents alliés traditionnels du PS essaient de profiter du scrutin pour peser au sein de la future majorité de Gauche. Nombreux sont donc ceux qui préfèreront faire liste à part. Les raisons sont diverses, allant de la remise en cause d’une politique jugée “pas assez à Gauche” pour certains, à un simple “concours de celui qui a la plus longue” pour d’autres. Toujours est-il que la Gauche Plurielle de 97 n’est plus qu’un vague souvenir.

Ensuite, les différents sondages poussent Lionel Jospin à être trop optimiste. Sûr de sa victoire (du moins de son accession au second tour), il ne s’attache pas à faire une campagne sur ses propres thèmes, mais se contente de suivre les thèmes imposés par la Droite (notamment la sécurité). Par orgueil, il aurait également refusé la main tendue de Christiane Taubira, qui lui aurait proposé de se désister à son profit. “Je gagnerai tout seul”.

Enfin, l’électorat de Gauche fait également trop confiance aux sondages. Persuadés de la victoire de Jospin, de nombreux électeurs ont le raisonnement suivant : ils voteront pour un “petit” parti au premier tour, afin d’infléchir la politique de Jospin dans le sens qu’ils souhaitent, puis voteront pour lui au second tour.

Pour rappel, les trois derniers sondages, réalisés les 17 et 18 avril 2002 par les institutes CSA, Ipsos et LCI/SOFRES donnent les résultats suivants au premier tour :

CSA Ipsos LCI/Sofres
Jacques Chirac 19.5% 20% 19.5%
Lionel Jospin 18% 18% 17%
Jean-Marie Le Pen 14% 14% 13.5%

Les résultats sont tout autres : si J. Chirac est en effet en tête, avec 19.88%, il est suivi de J-M Le Pen, à 16.86%, puis L. Jospin à 16.18%. Le candidat d’extrême droite se retrouve donc au second tour.

Cette nouvelle a l’effet d’un séisme sur la vie politique française, et particulièrement sur la Gauche française. En effet, les différents partis de l’ex-Gauche Plurielle ont cumulé plus de 30% des suffrages, et nombreux sont ceux qui regretteront l’absence d’un nouvel accord entre eux.

Couverture de The Economist suite au 21 avril 2002

Couverture de The Economist suite au 21 avril 2002

De nombreuses manifestations auront lieu par la suite, rassemblant plusieurs centaines de milliers de manifestants à plusieurs reprises. L’événement suscitera aussi de nombreuses réactions internationales, et fera la Une de plusieurs journaux étrangers.

Quelles sont vraiment les conséquences du 21 avril 2002 ? Difficile à dire. Les dernières élections présidentielles ont montré que les sondages n’étaient pas remis en cause, bien au contraire. Ils sont devenus un élément majeur (sinon L’élément majeur) des campagnes. Alors quoi ? Peut-être la notion de “vote utile“, qui a permis aux deux premiers candidats d’obtenir plus de 25% des voix en 2007. Mais surtout, la conséquence la plus probable du 21/04/02 est l’affaiblissement du PS qui s’en est suivi, affaiblissement qui a duré jusqu’au congrès de Reims de l’automne dernier. Il aura fallu attendre presque 7 ans pour que le Parti Socialiste soit à nouveau en ordre de bataille, prêt à gouverner le pays, avec des propositions concrètes et précises, et un programme homogène.

Pour finir, voici deux autres anniversaires que nous fêtons aujourd’hui :

1944 : Il y a (seulement !) 65 ans, le droit de vote était accordé aux femmes.

1997 : Il a 12 ans, Jacques Chirac prenait la meilleure décision de ses deux mandats, et annonçait la dissolution de l’Assemblée Nationale, qui conduira à la nomination de Lionel Jospin au poste de Premier Ministre.

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